Après Louis XIV les travaux se poursuivent sans discontinuer à Versailles. Louis XVI quant à lui en fera peu, et c’est donc, mise à part la touche charmante de Marie-Antoinette, qui marquera surtout Trianon, en grande partie le château de Louis XV que nous avons sous les yeux. L’auteur suit minutieusement toutes ces transformations, ce qui permet, en particulier lorsqu’on est sur place, de pouvoir revivre précisément en imagination les préoccupations et les rituels quotidiens d’une cour pour laquelle l’emplacement, la destination et jusqu’à l’agencement des pièces étaient d’une importance cruciale. (Édition annotée.)
De la description de la salle écrite par son architecte, retenons encore une particularité, que l’aménagement moderne à l’usage des assemblées parlementaires a fait disparaître : « Toute la partie en contrebas dans la hauteur du parquet contient dans son pourtour de petites loges grillées. Ce parquet s’élève dans tout son entier avec des crics pour être mis à la hauteur du théâtre et de l’amphithéâtre, dans les occasions de bals et de fêtes qui demandent toute l’étendue ». Cette disposition, due au sieur Arnoult, fut employée dès le premier jour des cérémonies du mariage du Dauphin, pour le festin royal. La scène, de son côté, pouvait être transformée en quelques heures en une seconde salle, garnie de toutes ses loges, ce qu’on fit pour y danser le bal paré, le troisième jour de ces fêtes mémorables.
Le motif le plus original de la salle est la colonnade ionique, qui forme les troisièmes loges et dont la corniche architravée se raccorde à celle de l’entablement de l’avant-scène. Les colonnes, comme le reste de la salle, sont de bois et creuses, peintes en marbre jaune, et l’or se joue dans les ornements des cannelures. La légère colonnade est interrompue dans son milieu par une haute arcade et un quart de voûte en cul-de-four ; cette sorte de grande loge, décidée après coup dans un dernier projet, au-dessus de celle du Roi, est garnie d’un lustre plus gros que ceux qui pendent dans chacun des entrecolonnements et que reflètent des glaces au fond des loges : « Ordinairement, observe le duc de Croÿ, pendant le spectacle, une salle est sombre pour ne pas nuire au théâtre ; mais celle-ci reste éclairée de douze grands lustres entre le grand ordre de colonnes, qui anoblit et distingue le dessin de cette salle, ce qui, d’en bas, éclairant un superbe plafond, fait un effet admirable » ; et l’enthousiaste visiteur ajoute cependant cette observation : « On ne peut aussi trop louer la belle dorure, le bon goût et la richesse des ornements en tout genre, et je doute qu’il y en ait une aussi riche nulle part ; mais gare l’humidité et que tout cela perde bien, quand il aura perdu son éclat de dorure et de vernis ! »
Pierre Girauld de Nolhac, dit Pierre de Nolhac (Ambert 1859 – Paris 1936)
Écrivain, poète, historien, il a eu dans sa vie deux amours : les Antiquités latines et le XVIIIe siècle français – Rome et Versailles. Ses recherches sur Pétrarque feront date. Ce fort lien affectif à l’humanisme de la Renaissance italienne et à l’esthétisme de la France de l’ancien régime l’accompagnera toute sa vie, qu’il fût Conservateur du Château de Versailles ou directeur du musée Jacquemart-André. Élu à l’Académie française en 1922, il laissa une oeuvre abondante et raffinée.
Préface de la première édition
I – Versailles sous Louis XV
II – Le Versailles de Gabriel
III – Les cabinets de Louis XV
IV – Les appartements historiques
V – Versailles sous Louis XVI
VI – Les appartements de Marie-Antoinette
VII – Les jardins au dix-huitième siècle