Le royaume de la rue Saint-Honoré

Madame Geoffrin et sa fille

Pierre de Ségur

Où étaient les courtisans, les princes du sang, les ministres, les membres des plus grandes familles françaises et européennes, quand ils n’étaient pas à Versailles ? Ils étaient chez Madame Geoffrin, discutant à bâton rompu avec écrivains, philosophes, savants et artistes. Ce salon où se forma la jeune demoiselle Poisson, toute récente épouse d’Étioles, était une véritable Cour, un reflet de Versailles, en moins empesé et en plus cultivé. La fille de Madame Geoffrin l’a d’ailleurs reproduit et continué chez elle avec le même éclat. S’appuyant sur des archives privées inédites, l’auteur nous fait le plaisir, avec cette étude, d’une piquante redécouverte. (Édition annotée)

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Cette union, comme le dit justement madame de la Ferté-Imbault, « ne semblait pas très raisonnable », car le futur avait quarante-huit ans sonnés tandis que la fiancée en comptait quatorze à peine. Mais l’amour et la raison n’ont rien à démêler ensemble, et François Geoffrin, rencontrant une fille d’une beauté remarquable, d’une éducation sévère, de famille honorable, convenablement dotée du fait de son état d’orpheline, et enfin – ce à quoi il tenait plus qu’à toute autre chose – d’une dévotion exemplaire, passa sans hésiter par-dessus toutes les considérations qui eussent pu le détourner de suivre l’inclination de son cœur. Quant à Thérèse, elle était à l’âge où les jeunes filles, faute de terme de comparaison, ne sont guère à même d’apprécier bien sainement le charme et le mérite d’un homme ; et l’ascendant de sa grand-mère, qui trouvait le parti sortable en tous points, la détermina sans grand peine.
Les choses furent menées rondement. Le contrat fut signé le 14 juillet 1713, en présence des membres de la famille et de quelques hauts personnages, tels que le marquis et la marquise de Vérac pour le futur, et pour la future, Louis de Montmorency-Luxembourg, prince de Tingry, Henri de Bourbon, prince de Neufchâtel, etc. La dot de Thérèse Rodet s’élevait au chiffre de « cent quatre-vingt-cinq mille cinq cent trente-huit livres et quinze sols », et la fortune de François Geoffrin formait un total de deux cent cinquante-quatre mille soixante-six livres, sans y comprendre un hôtel situé rue Saint-Honoré, qu’il tenait de sa première femme, et qui devait servir d’habitation au ménage. Le même jour, dans l’église Saint-Roch, eut lieu la cérémonie nuptiale, et la nouvelle madame Geoffrin, emmenant avec elle son frère Louis, dont elle ne voulait pas se séparer, alla s’installer dans la demeure où elle était destinée à vivre plus de soixante années.

Pierre de Ségur

Pierre Marie Maurice Henri marquis de Ségur – 13 février 1853, Paris ; 13 août 1916, Poissy.

Après un passage rapide par la haute administration, le petit-fils de la comtesse de Ségur se consacra définitivement à ses deux passions, l’histoire et l’écriture. Son œuvre, relativement peu abondante, est élégante et très bien documentée, ses relations dans le milieu aristocratique lui ayant facilité l’accès à des archives autrement peu disponibles. Le 14 février 1907 il devint le troisième Ségur à être élu à l’Académie française.

Introduction

Chapitre premier
La famille de Mme Geoffrin. – Sa grand-mère, Mme Chemineau. – Son éducation première. – Son mariage.

Chapitre II
Les premières années de mariage. – Caractère de M. Geoffrin. – Louis Rodet. – La marquise de Tencin. – Ouverture du salon de Madame Geoffrin. – Fondation des dîners du mercredi. – Querelles domestiques. – Résignation et mort de M. Geoffrin.

Chapitre III
Mort de madame de Tencin. – Constitution définitive du salon de la rue Saint-Honoré. – Les premiers habitués : Voltaire, Montesquieu, Piron, Fontenelle. – Influence de ce dernier sur l’esprit de madame Geoffrin. – Portrait qu’elle a tracé de lui.

Chapitre IV
Extension du nouveau salon. – Fondation des dîners du lundi, réservés aux artistes. – Le comte de Caylus. – Van-Loo. – Henry Costa de Beauregard. – Les étrangers : lady Hervey, David Hume, Horace Walpole.

Chapitre V
Analyse du caractère de madame Geoffrin. – Sa force de volonté. – Mélange de bonté et d’égoïsme, d’orgueil et de modestie. – Sa manière d’être avec ses amis. – Exemple tiré de sa conduite à l’égard de Marmontel.

Chapitre VI
L’humeur grondeuse et autoritaire de madame Geoffrin. – Burigny, son « majordome ». – La discipline de son salon. – Portrait physique de madame Geoffrin. – Sa toilette. – Son existence intime. – L’emploi de sa journée. – Son hôtel. – Sa fortune. – Ses relations avec la Société de Saint-Gobain.

Chapitre VII
Marie-Thérèse Geoffrin. – Son éducation. – Son mariage avec le marquis de la Ferté-Imbault. – Ses querelles avec sa mère. – Mort de son mari et de sa fille. – Caractère original de la marquise de la Ferté-Imbault. – Son goût pour l’indépendance. – Ses séjours à Pontchartrain et à Dampierre.

Chapitre VIII
Diversité des relations de madame de la Ferté-Imbautl. – Son séjour à Lunéville. – Amitié qu’elle inspire au roi Stanislas Leczinski. – Singulières confidences du vieux prince. – Montesquieu à la cour de Lunéville. – Stanislas Leczinska à Versailles. – Madame de la Ferté-Imbault et le cardinal de Bernis. – Influence qu’elle prend sur lui. – Attachement sérieux qui s’établit entre eux. – Leur longue correspondance.

Chapitre IX
Relations de madame de la Ferté-Imbault avec madame de Pompadour. – Madame Poisson et sa fille dans le salon de la rue Saint-Honoré. – Dernier entretien de madame de la Ferté-Imbault avec la favorite. – Le prince de Condé et la princesse de Monaco. – La mésaventure du prince de Conti.

Chapitre X
Les distractions littéraires de madame de la Ferté-Imbault. – Ses Extraits des philosophes anciens. – Elle contribue à l’éducation des filles de France. – Fondation de l’Ordre des Lanturelus. – Succès extraordinaire de cette institution. – Les Lanturelus et l’Encyclopédie. – Scrupules de madame de la Ferté-Imbault sur sa conduite envers madame Geoffrin. – Réconciliation des deux femmes. – Mariage du Beau-Matou et de la Belle-Minette.

Chapitre XI
Penchant de madame Geoffrin pour les hautes relations. – L’audience de la Dauphine. – Le roi de Suède Gustave III. – Correspondance suivie de madame Geoffrin avec l’impératrice Catherine II. – Origine de ce commerce épistolaire. – Brouilles et réconciliations successives. – La mort d’ivan de Brunswick. – L’affaire du manuscrit de Rulhière. – Irritation de Catherine et rupture avec madame Geoffrin.

Chapitre XII
Le « fils adoptif » de madame Geoffrin, Stanislas-Auguste Poniatowski. – Son élection au trône de Pologne. – Joie exubérante qu’en ressent madame Geoffrin. – Ses ambitions politiques. – Part qu’elle prend à la reconnaissance officielle du nouveau roi par la France. – Sa lettre au duc de Choiseul. – Succès de sa diplomatie.

Chapitre XIII
Première idée du voyage en Pologne. – Pourparlers et préparatifs. – Départ de madame Geoffrin. – Arrivée et séjour à Vienne. – Présentation à l’Impératrice Marie-Thérèse. – Joie et triomphe de madame Geoffrin. – Le prince de Kaunitz.

Chapitre XIV
Arrivée à Varsovie. – Accueil du roi de Pologne. – Bonheur sans mélange. – La vie de madame Geoffrin à la Cour. – Importance qu’on attribue en France à son rôle et à son influence. – Lettres de Marmontel et de Voltaire. – Revirement dans l’esprit de madame Geoffrin. – Sa querelle avec le Roi. – Causes probables de ce dissentiment. – Réconciliation finale. – Départ de Varsovie et retour à Paris.

Chapitre XV
Accueil que madame Geoffrin reçoit de ses amis parisiens. – Apogée de sa gloire. – Dépit de ses détracteurs et de ses  ennemis. – L’abbé de Guasco. – Publication des lettres familières de Montesquieu. – Défense que madame Geoffrin oppose à cette attaque. – Sa sérénité d’humeur. – Les petits soupers.

Chapitre XVI
Influence croissante de madame Geoffrin sur son entourage. – Son rôle modérateur. Docilité surprenante de ses amis. – Comment elle les récompense. – La généreuse donation qu’elle fait à Morellet. – Sa conduite singulière à l’égard de Diderot. – L’héritage de M. de Mairan. – Usage qu’elle en fait. – Caractère particulier de la bienfaisance de madame Geoffrin.

Chapitre XVII
Les familiers des dernières années : l’abbé Galiani, madame Necker, M. et madame Stuard. – D’Alembert et mademoiselle de Lespinasse. – Intimité croissante de ces derniers avec madame Geoffrin. – Inquiétudes que conçoit à ce sujet madame de la Ferté-Imbault. – Les commérages de Valentin. – Mort de mademoiselle de Lespinasse.

Chapitre XVIII
Préparatifs que fait madame Geoffrin pour la fin de sa vie. – Premiers symptômes d’affaiblissement physique. – Modification de son humeur et de ses goûts. – Ses sentiments en matière religieuse. – Le Jubilé de 1776. – Madame Geoffrin est frappée de paralysie. – Maladroite importunité de d’Alembert. – Sa conduite le jour des Sacrements. – Lettre que lui adresse madame de la Ferté-Imbault. – Exclusion définitive de d’Alembert et de ses amis. – Indignation du parti encyclopédiste.

Chapitre XIX
Madame Geoffrin se rétablit à moitié de son attaque. – Son attitude dans la querelle de sa fille et de l’Encyclopédie. – Soins dévoués qu’elle reçoit de madame de la Ferté-Imbault. – Sa sollicitude persistante à l’égard de ses amis et de ses protégés. – Sa sérénité devant la mort. – Singulière indifférence du public lors de sa disparition. – Les trois Éloges composés par Thomas, Morellet et d’Alembert. – Nouvelles polémiques que suscitent ces publications.

Chapitre XX
Madame de la Ferté-Imbault après la mort de sa mère. – Elle reprend peu à peu ses anciennes habitudes. – Persistance de l’ordre des Lanturelus jusqu’en 1789. – Mort de Burigny. – Impression profonde produite sur l’esprit de la marquise par le début de la Révolution. – Son découragement. – Consolations qu’elle reçoit du cardinal de Bernis. – Sa mort le 15 mai 1791.

APPENDICE
Extrait des carnets de madame Geoffrin
Anecdotes du règne de Louis XV
Lettre du prince de Condé à la marquise de la Ferté-Imbault
Lettres de madame Geoffrin au prince de Kaunitz
Lettres de l’impératrice Catherine II à madame Geoffrin
Lettre de madame Geoffrin au duc de Choiseul
Lettres de Montesquieu à l’abbé de Guasco
Correspondance inédite de Grimm avec madame Geoffrin et la marquise de la Ferté-Imbault
Lettre du Roi de Pologne à madame Geoffrin
Le Bureau d’esprit
Portraits de madame Geoffrin